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La bataille du Golfe de Leyte partie 2

Le piège était presque parfait (partie 2)

    Le 23 octobre commence un affrontement titanesque au large des Philippines. Etatsuniens et Japonais engagent plus de 200 navires de guerre, 3 000 avions dans la plus grande bataille navale du Pacifique. Pour les E.U.A il s'agit de conquérir les Philippines et de couper l'empire japonais de ses possessions dans le Sud du Pacifique. Pour les Japonais, la bataille doit mettre un coup d'arrêt à l'avancée étatsunienne en infligeant des pertes telle à la flotte de Washington qu'elle permettra à Tokyo ne négocier une paix moins dure avec Roosevelt. La marine japonaise décide donc d'engager la quasi totalité de ses forces dans un quitte ou double dramatique.


L'avant-bataille : les quatre piliers du plan japonais.

    Pour rappel, les Japonais ont pleinement conscience de leur infériorité en nombre et en qualité de matériel surtout en ce qui concerne les porte-avions et l'aviation embarquée. En découle un plan iconoclaste reposant sur quatre piliers fragiles.

    Le premier pilier suppose la coordination entre des forces navales dispersées et entre la marine et l'aviation terrestre. Le second repose sur le secret de la manœuvre visant à masquer aux Américains l'avancée de la flotte de surface tout en attirant leur attention au Nord du côté d'une flotte « appât » de porte avions. Le troisième donne à l'aviation terrestre un double rôle : protéger l'avancée des navires de surface et menacer la flotte des E.U.A. Le dernier pilier est psychologique et s'appuie sur la mentalité de l'amiral Halsey « Bull Halsey », un fonceur dont les Japonais espèrent détourner l'attention. La bataille qui va se dérouler pendant plus de 4 jours va contre toute attente donner aux Japonais une chance inespérée mais inexploitée de réussir leur impensable plan.

Acte 1 : les deux mâchoires japonaises tombent sur un os

    Depuis Singapour l’amiral Kurita a pris la tête d’une force de cuirassées, croiseurs et destroyers chargées de se glisser par les détroits et de s’abattre sur les forces amphibies étatsuniennes. L’officier japonais est conscient du risque de sa mission et il estime que 50 % de ses forces seront détruites. Or le débarquement rapide des Américains le force à prendre la mer très tôt. Pour maximiser ses chances il scinde ses forces en deux. Lui même avec 5 cuirassées, 12 croiseurs et 15 destroyers passera par le Nord et le détroit de San Bernadino. Il confie au vice-amiral Nishimura deux cuirassées, 1 croiseur et quatre destroyers avec ordre de passer par le Sud via le détroit de Surigao afin de prendre la force américaine entre deux mâchoires. Une troisième force commandée par le Vice-Amiral Shima forte de deux croiseurs lourds, un croiseur léger et quatre destroyers fait route également vers le Sud mais à cause du silence radio elle n’apprendra que tardivement la présence de l’autre flotte ce qui limitera leur coordination.

L'amiral Kurita

Pour réussir sa mission, Kurita espère d’une part que son avancée restera le plus longtemps secrète, que l’aviation japonaise sur terre empêchera la Task Force 38 (les portes avions modernes et rapides d’Halsey) d’intervenir et surtout que l’amiral Ozawa jouera parfaitement son rôle de leurre. Or l’avancée est japonaise est détectée le 22 octobre par les sous-marins étatsuniens Dace et Darter qui coulent le 23 deux croiseurs japonais (dont celui portant la marque de Kurita), en endommagent un troisième et préviennent la flotte étatsunienne. Dans le même temps et malgré ses efforts, l’Amiral Ozawa n’a pas réussi à se faire repérer par Halsey. Seule l’aviation terrestre et embarquée nippone réussit en partie sa mission. 

L'amiral Halsey

    Ce premier acte de la bataille se décompose en trois moments. Au Nord tout d’abord la flotte de Kurita navigue sous les bombes et torpilles américaines. Malgré la D.C.A supplémentaire embarquée plusieurs navires sont touchés dont le super-cuirassée Musashi. Pourtant Kurita continue sa route dans un ciel dominée par les E.U.A de 10h30 jusqu’à 16 heures en ce 24 octobre. Mais sans nouvelle de l’action d’Ozawa et des résultats des attaques aériennes il stoppe sa marche et fait machine arrière. Cette première volte face inattendue et un temps critiqué eva avoir deux effets bénéfiques : elle épargne sa flotte et surtout elle va induire les Américains, Halsey en erreur. Le bilan de cette première incursion est lourd car à 19 h 30 le Musashi touché par 16 torpilles et 18 bombes sombre avec 1000 hommes d’équipage.


Le second acte se déroule dans le ciel. Les forcées aériennes nippones basées aux Philippines vont se démener pour menacer la Task Force 38. Pourtant les aviateurs japonais sont surclassés en qualité et en matériel malgré l'ajout de forces aériennes issues de la flotte mobile. Cette présence de pilotes de la marine aura un impact important pour la suite de la bataille, nous en reparlerons. Dès la matinée du 23 octobre, les avions de reconnaissance japonais de la 1ère flotte aérienne du contre-amiral Onishi repèrent une partie des portes-avions rapides étatusuniens, le groupe 38.3. Ces navires vont essuyer l'attaque de plusieurs dizaines d'avions japonais lesquels essuient de terribles pertes. Mais ces coûteuse attaques vont avoir trois effets positifs. Le 1er concerne la destruction du porte-avions Princeton touché à 10 heures par une bombe lâchée par un bombardier judy qui enflamme les réservoirs de carburant du hangar à avions. Le 2nd est lié à la violence des attaques qui empêchent les portes-avions de ce groupe de lancer leur force de bombardiers contre Kurita et ses navires. Le troisième est lié à la présence de ces fameux avions de la marine repérable par leur empennage. Elle convainc Halsey et ses officiers que des porte-avions japonais rôdent au Nord et qu'ils sont une menace sérieuse.


Le troisième acte se déroule au Sud. La deuxième mâchoire japonaise, les forces de Nishimura sont repérées le 24 octobre au main et bombardées par l'aviation étatsunienne sans grand succès. Celle-ci accaparée par l'attaque au Nord laisse aux forces de la VIIème de gérer la menace notamment le Task Group 77.2 de bombardement et d'appui feu sous le commandement de l'amiral Olendorf. Celui-ci est conscient que ses opérations de bombardement ont épuisé son stock de munition, il faut donc privilégier un combat court et violent. Il a sous la main heureusement une force imposante composée de 6 cuirassées anciens mais modernisés, trois croiseurs lourds, 2 croiseurs légers, 29 destroyers et 39 vedettes lance-torpilles. Ses forces vont engager les japonais en deux temps lors d'une attaque de nuit. Les destroyers et vedettes lance torpilles attaquent en premier à la torpille afin d'affaiblir et de désorganiser la force japonaise. A partir de 22 heures, les vedettes lancent la charge. L'opération échoue malgré plus de 30 torpilles larguées. Mais les défauts des radars japonais limitent l'impact de leur contre attaque qui ne détruit qu'une vedette tandis les Etatsuniens en apprennent plus sur la force et la direction des navires nippons. Vers 3 heures du matin, les destroyers prennent le relais et lancent 50 torpilles qui font mouche : un cuirassé japonais est endommagé, un autre cuirassée et trois destroyers sont coulés. La formation japonaise peine à conserver sa cohérence. A 3h 50 les cuirassés étatsuniens entrent en scène barrant le « T » de la formation japonaise. Leur bombardement dure 20 minutes. Le cuirassé Yamashiro précédemment torpillé est détruit, le reste de la flotte nippone bat de retraite. La flotte de Shima qui s'engageait à son tour dans le détruit se replie également.


Au soir de ce premier jour de combat, l'avantage est clairement du côté des E.U.A. Les Japonais ont déjà perdu 3 cuirassés et des centaines d'avions. Mais un improbable concours de circonstance va rebattre les cartes. 

Retrouvez ici la partie 1 et la partie 3

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