A redécouvrir

Critique de Bullet Train

Un train pas comme les autres


Quand le réalisateur de John Wick et Deadpool 2 s’empare de l’excellent roman Maria Beetle de l’auteur Kotaro Isaka, cela donne un film très intriguant. Si vous rajoutez un casting 5 étoiles et une ambiance de huis clos, vous obtenez le film d’action de l'été 2022, décomplexé, délirant, s’assumant totalement.

L’Homme du train

« Coccinelle » tueur à gages de son état est en pleine crise existentielle. Finies les missions dangereuses, finis les conflits, il choisit de se recentrer sur des missions simples. Et cela tombe bien car sa « référente » a besoin de lui pour remplacer Carver sur une opération facile : voler une mallette dans le shinkansen entre Tokyo et Kyoto. Rien de bien compliqué.

C’était sans compter sur la malchance de coccinelle. En effet dans les wagons de ce train à grande vitesse se trouve une collection de tueurs : mandarine et citron deux frères redoutables, le frelon une experte du poison, le loup un homme de main des cartels mexicains. S’ajoutent un père en quête de vengeance, une adolescente mystérieuse et un serpent venimeux en liberté. 


Le train de l’angoisse

Le projet Bullet train s’appuie sur une note d’intention. Offrir un huis clos d’action dans l’espace confiné du shinkansen. Sur ce point le film tient toutes ses promesses. En effet le réalisateur, scénaristes exploitent parfaitement le décor fascinant du train. Chaque wagon a sa propre identité et devient un potentiel espace de conflits. Les protagonistes vont exploiter les objets spécifiques dans des joutes très impressionnantes. Autre élément remarquable, la gestion de l’extérieur. Le héros a plusieurs fois l’occasion de sortir du train et l’histoire trouve toujours une bonne raison de le ramener à l’intérieur.

Bullet Train s’appuie aussi parfaitement sur l’univers japonais. D’abord le shinkansen est magnifié dans de nombreuses scènes mettant en avant ses courbes, son confort, son modernisme. Ensuite plusieurs éléments de la culture mainstream nippone sont intégrés à l’intrigue. On retiendra le passage des toilettes, de la mascotte ou du wagon « silencieux » lequel devient à la fois le théâtre d'une séquence très drôle. Et tout ceci s’enchaîne bien grâce à un scénario astucieux qui maintient 2 heures durant le suspense, plaçant d’habiles fusils de Tchékov tout en parvenant  à nous surprendre.


Quand Tarantino rencontre Guy Ritchie et John Wick

David Leitch, cascadeur passé derrière la caméra, a un sens inné de l’action. Il sait en effet parfaitement mettre en scène et restituer les combats, jouer avec les décors, la position des corps. Il démontre dans ce film que sa technique s’améliore car les affrontements sont en plus ciselés, originaux, très rythmés. Malgré l’exiguïté du train, il parvient à donner de l’ampleur à chacune de ses scènes s’appuyant sur les reflets ou la longueur des wagons. En n’hésitant à glisser des clins d’œil à ses précédents films notamment John Wick.

Son film multiplie visuellement et narrativement les hommages à  Tarantino et Guy Ritchie. Les citations au premier sont évidentes d’abord par les dialogues où les acteurs évoquent avec détachement des moments horribles ou dissertent sur un dessin animé pour enfant. Ensuite plusieurs scènes s’inspirent de Kill Bill Volume 1, notamment de l’affrontement entre Béatrix Kido et Vernita Green dans la cuisine. La seconde inspiration c’est évidemment Guy Ritchie et ses personnages de truands décalés (The Gentlemen) que l’on retrouve à travers le duo Citron-Mandarine. Bullet train adopte aussi le montage typique des films de Guy Ritchie : narration éclatée, flashbacks et enchaînements nerveux. 


Des acteurs au top

David Leitch a convoqué un casting de luxe. Brad Pitt en guest star ; Bryan Tyree Henry, Aaron Taylor-Johnson, Bad Bunny, Michael Shannon en seconds rôles de luxe ; Sandra Bullock, Ryan Renolds en caméo. Auxquels se rajoutent d’excellents acteurs japonais, Hiroyuki Sanada que l’on ne présente plus, Karen Fukuharala, la magnifique Kimiko de The Boys. Et tous ses acteurs s’amusent comme des fous, cela se ressent à chaque séquence.

Brad Pitt est à nouveau irréprochable dans son rôle de tueur en gage en pleine thérapie. On retrouve cette classe que Tarantino a magnifié dans Once upon a time in Hollywood et qui permet à l’acteur de transcender la moindre scène du quotidien. Parmi les acteurs secondaires tous excellents, Aaron Taylor-Johnson est une vraie découverte. Il rayonne de classe, de charisme et de charme. Il y a fort à parier que cette prestation va lui ouvrir de nombreuses portes. Et son duo avec Bryan Tyree Henry fonctionne totalement jouant sur toute la profondeur des relations en frère. 

Tenant ses promesses de bout à bout, Bullet Train est la comédie d’action délirante de cet été. Une petite pépite portée par un casting royal et un réalisateur de plus en plus inspiré.

Commentaires