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Critique de Hanson and the beast

Quand Hellboy rencontre Men In Black et Roméo et Juliette


A part Pompoko de Takahata et Les Enfants Loups de Hosoda, rares sont les films asiatiques traitant des démons incarnés en hommes à être parvenus jusque sur les écrans occidentaux. Pourtant le thème est très présent dans la production asiatique, que l'on se rappelle Green Snake ou Histoire de fantômes Chinois par exemple. La preuve en est la sortie en 2017 sur les écrans chinois de Hanson and the Beast, une comédie fantastique audacieuse dans la veine des productions Hong-Kongaises des années 1990.

Marié à tout prix

Yuand Shuai travaille au zoo de Shanghai où il est chargé de nourrir les animaux. Un métier qu'il aime mais qui ne lui permet pas de faire face à ses dettes. Il a en effet emprunté de l'argent à de petits criminels pour financer un projet de film qui n'a jamais eu lieu et pour soigner son père hospitalisé dans une institution coûteuse. Pour faire face à  ses créances, il est prêt à accepter des mariages blancs avec de riches femmes. Sa vie bascule lorsqu'il rencontre Bai Xianchu, une kitsune, une démone-renarde, qui peut prendre forme humaine. Ce qu'il ne sait pas, c'est qu'il lui a sauvé la vie lorsqu'elle était un bébé renard et que depuis elle est amoureuse de lui. Mais les lois des démons sont claires : il leur est interdit d'interagir avec les humains et encore plus de se marier. Alors que les deux amoureux enfreignent ces règles, l'autorité des démons envoie à leur trousse son plus redoutable serviteur.

Hanson and the Beast renoue avec la grande tradition des comédies fantastiques Hong Kong. Le film en effet est extrêmement drôle et multiplie les moments de comédie. On se plait devant la série de "date" improbables qui échouent pour des raisons toujours plus loufoques. On se plaît devant le téléscopage de notre monde avec celui des démons (les apparitions du renard). On apprécie les personnages comiques récurrents du film : le gang des usuriers, l'amoureux transi de la renarde grimé comme un star de K pop. On apprécie les scènes de quiproquos : le tournage de film, la prison, le directeur-chauve souris. Grande qualité aussi les hommages à des scènes comiques et cultes 7è art : on reconnaîtra pêle-mêle un clin d'oeil à My sassy girl, à Batman (énorme), à Men In Black. 

Le film joue également la carte de la romance sans trop tomber dans l'excès et la mièvrerie si typiques des réalisations chinoises. Le film flirte souvent avec le sentimentalisme outrancier (surtout dans sa 1ère partie) mais il sait désamorcer ces moments trop naïfs en appuyant sur l'incongruité de son histoire (le cadeau aux beaux parents démons !!), la maladresse de ses héros. Et dans son dernier acte il parvient même à exploiter son histoire d'amour avec justesse. La  scène de la cellule, hommage d'ailleurs à une autre scène célèbre de  Histoire de fantôme chinois II, est une totale réussite : touchante, dramatique, forte. Cette romance efficace  doit beaucoup à l'excellente alchimie du duo Feng Shaofeng (Detective Dee II et III) et Liu Yifei  (Mulan de la version Disney).  Ils rendent crédible ce Roméo et Juliette fantastique. 

Un univers riche plombé par le numérique

Hanson and the Beast est un film extrêmement généreux. L'univers qui nous est décrit est cohérent, riche. Le film croise Men In Black et Hellboy II. En effet il nous met en scène notre monde réel où les démons côtoient en secret les humains, où une police démone traque les contrevenants et efface la mémoire des humains témoins d'événements anormaux. Le film construit comme dans Hellboy un monde souterrain, celui des démons, aussi vaste que le nôtre mais caché aux regards des humains. Le réalisateur a choisi de ne pas se limiter et de montrer toutes les possibilités de cette histoire : les nombreux démons cachés, les humains qui sont courant, le lien entre mythologie humaine et existence des démons, les tensions au sein du monde des démons... Cela fait plaisir de sentir que les producteurs ont décidé de croire à fond dans leur scénario et intelligemment esquissé l'immensité de leur univers.


Malheureusement aussi investis que soient ses acteurs, aussi riche que soit son histoire, ce film souffre du défaut récurrent à de nombreux blockbusters chinois : les effets spéciaux. Avec un tel univers, les effets numériques devaient d'être impeccables pour obtenir la suspension d'incrédulité du spectateur. Or les phases de transformations du loup, les scènes de poursuite sur les toits, ont 20 ans de retard sur ce que font les Américains. Si l'on compare les créatures de ce film  aux singes de la nouvelle trilogie la planète des singes ou aux ours de la série His dark Materials ou même aux bestiaires du marché de Trolls de Hellboy II, le fossé est énorme et explique pourquoi le film n'a pas été un carton. 

Hanson and the beast laisse en définitive une étrange impression. Celle d'un film qui avait la matière à devenir un nouveau classique du fantastique asiatique mais que les effets spéciaux condamnent à être une étrangeté sympathique. 

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