Retour aux affaires
L'échec commercial du précédent volet a mis fin à la brouille entre la société de production Film Workshop et le génial réalisateur des trois premiers opus. Tsui Hark revient à la baguette, toujours sans Jet Li mais avec Chiu Man Cheuk qui avait remarquablement repris le rôle. Poursuivant l'évolution entamée dans le précédent film, Tui Hark continue le glissement vers un ton plus comique, moins politique. Pour un résultat très satisfaisant mais imparfait.
L'histoire retourne vers le Sud de la Chine loin des intrigues de la cour impérial. Le chaos politique rend difficile la vie en province. Les juges ne siègent plus, les policiers ne sont plus payés, l'insécurité règne notamment sur mer où les pirates s'enhardissent en rançonnant, massacrant les rares commerçants osant encore s'aventurer au large. Ils deviennent un péril mortel même pour les terriens. Alors qu'une partie de la Chine souffre de faim, des quantités de riz s'agglutinent dans des dépôts, pourrissant faute de pouvoir être vendues. Des centaines de civils chinois fuient chaque jour vers Hong Kong. Pour Wong Fei Hong, de nouveaux choix difficiles se posent : partir ou intervenir contre les pirates.
Première très bonne idée du film concerne la réunion de tous les disciples (depuis l'épisode 1) qui forment une vraie famille et nourrissent toute la dimension comique de l'intrigue. Le ressort de la comédie s'appuie sur leurs caractères différents, les gaffes, les interactions notamment entre Leung Fu, pied-bot et Bucktooth, un duo excellent. Les disciples prennent ainsi une place prépondérante dans l'humour, notamment les scènes de quiproquos entre Wong Fei Hong et ses deux tantes. Ces petites moments digne du vaudeville reprennent des situations très prisées par Tsui Hark par exemple dans le second opus d'Histoire de fantômes chinois ou dans le festin Chinois.
Seconde force du film concerne évidemment le retour derrière la caméra de Tsui Hark. Les scènes d'action (finalement rares jusqu'au final magistral) éclatent d'une inventivité toujours intacte, que ce soit le duel sur une jonque, l'infiltration dans la base des pirates ou l'affrontement final. Tsui Hark convoque tout un imaginaire propre à la magie des pirates : vieux corsaire momifié, pièges tortueux, affrontements en équilibre, combattants hors pair, armes légendaires. Vous avez aimé Le marin des mers de Chine ou pirates des Caraïbes, vous serez comblé. La dernière demi-heure passe à une vitesse folle. D'autant plus que Tsui Hark intègre dans ses séquences les armes à feu !!! une sacrée audace qui se mélange parfaitement au monde des arts martiaux.
Et pourtant malgré ses énormes qualités, le film n'égale pas les premières oeuvres de la série. En effet les antagonistes ne sont pas très approfondis. Il y avait pourtant du potentiel avec la fiancée du pirate. Mais ils sont juste méchants sans véritable motivation plus profonde. Nous sommes donc loin des duels entre Jet Li et Donnie Yen. De plus en termes de réalisations, la reconstitution des environnements est paradoxalement plus faible, plus terne que dans les premières oeuvres. Enfin il manque tout le discours politique si cher à Tsui Hark, quasi absent sauf dans une scène finale dans le tribunal très intelligente et riche de sens.
Devant le cinquième opus, les fans de la série ne seront pas déçus. De la comédie (beaucoup), de l'action (toujours fun), des personnages attachants. Mais en choisissant le ton léger, Tsui Hark polit son propos et échoue à transcender son histoire.
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