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Les moines italiens et le Tibet

Ippolito Désidéri, l’apôtre du Tibet


Depuis la fin du 16è siècle, diverses missions religieuses chrétiennes abordent l'Asie et notamment la région du Tibet.  Elles auront une influence importante en Europe développant la curiosité pour une région lointaine, créant un engouement pour la culture de ces montagnes qui contribuera au succès de la tibétologie. Ces premières expéditions furent difficiles. Et il faut attendre le 17 ème siècle pour que les contacts aboutissent à des rencontres durables. 

En effet politiquement la situation du Tibet est confuse. Depuis le 13ème et la poussée mongole, le royaume est théoriquement sous la domination mongole.  En réalité c’est un protectorat assez autonome traversé par des querelles de successions qui finissent par profiter au 16ème siècle aux membres de l’école bouddhique Gelug qui occupent la fonction spirituelle de dalaï lama. Son autorité en matière de religion est unique. Par exemple Le 3ème dalaï lama se rend en Mongolie de 1569 à 1578 et va convertir Altan khan, souverain des mongols. En 1649 le 5ème dalaï lama est invité par l’empereur mandchou Shunzhi à Pékin qui lui construit le temple jaune de l'Ouest. Il séjourna 4 ans dans la capitale impériale renforçant l’influence spirituelle du Tibet.

Politiquement l’école des Gelug exerce une régence dépendante des puissances extérieures. En effet en 1630-1636 pour éliminer le dési de tsang, un concurrent local soutenu par l’école bouddhiste du karma kagyu, les gelug doivent appeler à l’aide le roi des kalmouks qohots Güshi Khan. Celui vainqueur devient roi du Tibet où il nomme un régent qui gouverne le royaume avec le dalaï lama. Mais les désir d’indépendance du Tibet sont forts. Sous le règne du 5ème dalaï lama, le Tibet s’agrandit au Sud et à l’Ouest tandis que le palais du Potala est construit. Surtout le successeur du roi Güshi perd de son autorité sur le Tibet qui échappe progressivement à son contrôle. Les désirs d’indépendance du Tibet sont pourtant vite contenus. En effet Lhazang Khan nouveau souverain des kalmouks prend prétexte d’un conflit avec le 6ème dalaï lama pour envahir en 1705-1706 le royaume et déposer son souverain, soutenu dans son expédition par le khan des mongols et l’empereur de chine. Mais l’homme qu’il choisit pour devenir le nouveau dalaï lama n’est pas reconnu par le courant gelug qui appelle à l’aide une autre tribu kalmouk, les dzoungars qui chassent Lhazang khan en 1717 pour devenir à leur tour un nouvel occupant. Un chaos qui profite finalement aux empereurs chinois mandchous qui interviennent à leur tour, en 1720 chassent les dzoungars installent un 7 ème dalaï lama lequel reconnaît en échange la suzeraineté chinoise. Le Tibet devient ainsi une province chinoise. 

C’est dans ce contexte que le missionnaire jésuite Ippolito Désidéri se rend au Tibet. Né en 1684 en toscane, il intègre la compagnie de jésus en 1700. Ordonné prêtre en 1712, il est intégré à une nouvelle mission au Tibet, la troisième, la même année. Arrivé en 1714 en Inde du nord, il arrive en 1716 à Lhassa. Le nouveau roi Lhazang khan le reçoit et privilège rare lui donne le droit d’acheter une maison à Lhassa. Autre immense privilège, le prêtre peut pratiquer le prosélytisme en enseignant le christianisme. Il séjourne au Tibet jusqu’en 1721 étudiant le textes bouddhiques, apprenant le tibétain, entrant à l’université monastique de Sera où il étudiera le courant gelug. Véritable tibétologue il multiplie les échanges, débats spirituels avec ses hôtes, rédige des traités en tibétain pour expliquer les fondements du christianisme, compare le bouddhisme avec la morale chrétienne, tente de le critiquer tout en tentant de définir la notion de mantra. Les tensions politiques et un conflit avec les capucins l’obligent à quitter définitivement le tibet en 1721. Il consacre une partie de son temps à rédiger une immense étude sur la géographie du Tibet, les coutumes, la culture du Tibet. 

Par son œuvre de traduction des textes chrétiens aux tibétains, ses prêches, sa curiosité son action lui a valu le surnom d’apôtre du Tibet et d'être l’un des fondateurs de la tibétologie.

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