A redécouvrir

detective dee 2 : le dragon des mers de Chine

Tsui Hark lâche la bride


Les Tang règnent sur la Chine. Si l'empereur Gaozong contrôle les rouages d'un immense empire, c'est son épouse l'impératrice Wu qui exerce la réalité du pouvoir. Une situation qui attise les rancoeurs et les rumeurs de complots à la cour et dans les rues de Luoyang la capitale. Lorsque la flotte envoyée par l'impératrice aider le royaume coréen allié de Baekje est détruite par un monstre marin, le bruit court que c'est le redoutable dragon des mers qui achâtié l'orgueilleuse impératrice. Pour l'apaiser il est décider de lui offrir la courtisane Yin et de l'enfermer dans le temple des dragons des mers. Mais à la cour les apparences sont trompeuses. Tandis que la courtisane se retrouve être la victime d'un horrible chantage, l'impératrice méfiante confie au Juge Dee la mission de trouver qui a orchestré la destruction de sa flotte. Entre superstitions et politique, le juge Dee a la douloureuse charge de comprendre qui se cachent derrière le dragon des mers et l'étrange homme difforme qui suit comme son ombre la courtisane. 


Tsui Hark aime les surprise et avec ce second opus il le prouve. Detective Dee 2 n'est pas une suite mais une préquelle qui nous montre la jeunesse du juge Dee et raconte une de ses enquêtes bien avant les événements du premier opus, qui le conduira à prendre possession de l'épée dragon docile. Choix assez surprenant qui a on le verra des incidences sur les acteurs. Autre élément la narration retrouve ici une des habitudes de Tsui Hark : l'imbrication de nombreuses trames narratives qui peut perdre le spectateur. Enfin techniquement le film utilise massivement les ressources des CGI et effets 3D et semble par certains côtés être très expérimentales dans le bon sens du terme, afin de libérer totalement l'énergie créatrice du bonhomme, réussir ce mixte entre conspiration, magie, féerie et imaginaire mystique chinois. Sans concession le film convoque des scènes de batailles navales tout droit sorties des Trois Royaumes de John Woo, du bestiaire digne de Journey to The West et le faste de la Cité Interdite de Zhang Yimou.

Visuellement le film est encore une fois rempli de trouvailles, d'audaces de mise en scène. Tsui Hark se lâche totalement en matière d'univers magiques, de scènes d'arts martiaux explosives, de plongée dans un univers fantasmé et fantastique. Tout va très vite avec une lisibilité incroyable, un sens de la chorégraphie intacte (la présence de Yuen Bun n'y est pas pour rien). Tsui Hark se permet même dans la dernière partie du film de montrer comment lui à la différence d'Hollywood sait exploiter une idée à priori mauvaise : un navire avec un monstre et un cheval. Tout est aussi incroyablement beau, coloré, que ce soient les décors, les costumes, les environnements. Tsui Hark nous plonge dans un état étrange entre magie et réalisme. Tout n'est-il qu'illusion ? le dragon des Mers existe-t-il ou n'est-ce comme le dit l'impératrice que mythe ?

L'histoire est particulière et révèle l'incroyable audace du réalisateur. Car d'un côté vous avez l'intrigue principale faite de complots, de clans, de trahison qui me semble un peu moins intéressante que la première, notamment dans le dosage fantastique et réel. Mais en réalité cette première histoire n'est qu'un prétexte à un message beaucoup plus fort et subversif.  Sans équivoque c'est Tsui Hark qui parle à travers l'enquête du juge Dee de ce qui ne va pas dans la Chine actuelle : des élites corrompues, une bureaucratie inefficace, des clans soucieux que de leurs intérêts. Et il va très loin obligeant la cour impériale à boire de l'urine pour survivre à un mystérieux poison, en décrivant une impératrice manipulatrice à souhait, décomplexée et usant de tous les artifices pour maintenir le peuple dans l'ignorance. Un discours fort qui a échappé aux foudres de la censure par la maestria de la narration. Tout est suggéré.

Il reste néanmoins que ce film est inférieur au premier. En effet on peu relever deux faiblesses : le scénario un peu confus parfois et le choix de remplacer Andy Lau par Mark Chao.  Ce dernier joue bien en imposant un héros "force tranquille" d'apparence pour se glisser hors des pièges de la cour. Reste que son charisme n'arrive pas à égaler celui d'Andy Lau notamment lors des face à face avec l'impératrice.

Mais ne boudons pas notre plaisir, Detective Dee 2 est un très bon film divertissant, beau, audacieux et très intelligent dans son sous-texte. 

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