A redécouvrir

Quand un catcheur négocia la libération d'otages

La vie étonnante d'Antonio Inoki




C'est une  histoire hors normes digne d'un roman au point de susciter une forte dose d'incrédulité. Et pourtant en 1990 en pleine guerre du Golfe et de crise des otages, le gouvernement japonais envoya une délégation négocier la libération d'une centaine de japonais, prisonniers en Irak et utilisés comme bouclier humain. Et parmi les diplomates, un ancien catcheur, une star au Japon et dans le monde, Antonio Inuki qui développa une négociation atypique.


Antonio Inoki né en 1943 c'est d'abord un physique reconnaissable entre tous : un mâchoire carrée digne de requin dans James Bond, 1m 82 et 102 kilos de muscle. Le tout associé à un don pour le sport (athlétisme, lutte) et surtout les combats libres prototype du futur M.M.A. C'est en tant que catcheur qu'il devient une star nationale (il tourne des dizaine de publicités) et internationale surtout. Il combat sur tous les continents. En 1976 par exemple il défie le lutteur pakistanais Akram Pahalwan sur ses terres à qui il brise l'épaule, puis en 1979  Jhara Pahalwan le neveu (à la fin de la rencontre serrée, Inoki ira lever le bras gauche de son adversaire, lui accordant une victoire et gagnant le coeur du public pakistanais). Son combat le plus mémorable se tint le 26 juin 1976 à Tokyo contre Mohammed Ali, un match précurseur du M.M.A en beaucoup moins violent qui s'acheva sur un match nul. En 1995 il organise en Corée du Nord un spectacle de lutte professionnelle réunissant des combattants japonais, canadiens, américains dont le champion Ric Flair. 190 000 personnes y assistent à Pyongyang. 




Quand il prend sa retraite sportive à la fin des années 1990, sa reconversion en politique était déjà entamée. Il est élu à la chambre haute de la diète, représentant le parti qu'il a fondé (le parti des sports et de la paix) en 1989. Il quitte la politique en 1992 suit à une défaite électorale et à des scandales politiques. Il fait cependant son retour en 2013 au côté du parti pour la restauration du Japon, un parti à droite et assez nationaliste, avant de le quitter pour une nouvelle formation "le rassemblement pour dynamiser le Japon". C'est dans ce cadre qu'il participe aux rencontres informelles avec l'Irak en 1990. Les négociations entre le ministère des affaires étrangères et les Irakiens piétinant, il fut décidé d'utiliser le populaire député, celui-ci se présentant non comme un émissaire politique mais un représentant du peuple. L'ancien catcheur de rendit trois fois en Irak entre septembre et décembre, utilisant son sens de l'image pour se mettre en scène au côté d'Uday Hussein, fils aîné de Saddam Hussein, pour aller prier dans la mosquée de Karbala (premier fois qu'un diplomate japonais entrait dans ce lieu saint) ce qui impliqua de se convertir. Mais les Irakiens sont difficile à convaincre : les diplomates japonais (dont l'ancien premier ministre Nakasone) ont obtenu la libération des femmes et les enfants mais les hommes demeurent en Irak.




Ce qui va faire fléchir les Irakiens, c'est lorsque que le 30 novembres, Inoki se rend à Bagdad avec des membres des familles des otages toujours retenus et organise en parallèle un festival au nom de la paix réunissant lutteurs, judokas et autres sportifs alors que la guerre menace : une initiative en son nom propre alors que l'O.N.U vient de voter l'emploi de la force pour libérer le Koweït C'est grâce à ses liens avec Uday, ministre entre autres des sports, qu'il obtient la libération des 41 derniers otages (les femmes et enfants ayant été libérés plus tôt) au début du mois de décembre. Dans les jours qui suivent tous les étrangers sont libérés signe que le régime tente de trouver une voie de secours. 


Inoki a-t-il fait fléchir à lui seul les autorités irakiennes ? non ce serait exagéré. En revanche il a permis d'accélérer la libération des otages japonais, offrant consciemment ou inconsciemment aux irakiens la vitrine médiatique qu'il souhaitait pour corriger une image comprise par l'aventure koweïtienne et en démontrant un sens politique certain. 

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