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Toyotomi Hideyoshi et Alexandre le Grand

Deux figures légendaires de l’histoire japonaise et grecque présentent des similitudes intéressantes. Par de-là les 1800 années qui les séparent, le conquérant macédonien et l’unificateur nippon ont des parcours étonnement comparables. Immersion dans une nouvelle étape de ces histoires parallèles.



















Toyotomi Hideyoshi est l’un des plus extraordinaires personnages de l’histoire japonaise, figure majeure de la trinité (Nobunaga, Toyotomi et Tokugawa) qui vont unifier le Japon féodal et construire le système shogunal qui pacifiera le pays pendant plus de 200 ans. Toyotomi naît dans un village pauvre dot le père est ashigaru, fantassin pour le seigneur local Oda. L’enfant turbulent (né vers 1536) est envoyé en pension dans un temps dont il fracassera une idole ; s’échappera pour intégrer une troupe de bandits ; accompagnera un ermite vagabond avant en 1558 d’entrer par audace au service du daimyo des Oda. Sa force de caractère plaît tout de suite au seigneur qui en fit son écuyer, le surnomme amicalement le « singe ». Ses qualités de stratège lui permettent de gravir les marches. Il devient un des hommes de confiance du nouvel homme fort du Japon. Mais en 1582 le drame survient : Oda Nobunaga est trahi et assassiné par un de ses officiers Akeshi Mitsuhide. Toyotomi se sent pousser des ailes en tant que père adoptif de l’un des petits fils de Nobunaga. Il organise les funérailles de son seigneur tout en divisant les fils Nobunaga et en éloignant ou ralliant à sa cause les généraux rivaux (Shibata Katsuie et Tokugawa Ieyasu). Toyotomi a dès lors les mains libres pour poursuivre l’œuvre de Nobunaga. D’abord en 1582 il retrouve et tue l’officier félon. Ensuite il soumet le clan ennemi des Môri et magnanime les intègre dans son clan en leur demandant de conquérir l’île de Shikoku. Il montre ainsi une de ces qualités pour rallier les daimyos belliqueux comme les Shimazu, Uesugi et surtout les Tokugawa. Ainsi en 1590 il ne reste plus qu’un clan à lui résister les Hôjô dans les plaines de l’Est qui sont contraints de capituler. En 10 ans il a unifié les pays. Mais l’œuvre de l’homme va plus loin : infatigable législateur, il décide de moderniser le pays. Il fixe un cadastre rural, désarme les campagnes, répare temples, monastères, reconstruit la capitale et bâtit un immense à château à Osaka. Soucieux du détail il inonde le pays de shuinjô, des lettres et décrets qui cadrent la réforme du pays. L’homme n’en demeure pas ambitieux et très conscient de la fragilité d’une société japonaise où les clans de guerriers restent bouillants. Il lance donc sa jeune puissance dans une colossale aventure outre-mer : la conquête de la Corée voire de la Chine. En 1592 et 1597 deux immenses armées japonaises parties de Kyushu débarquent. Sur terre leur élan est irrésistible, l’armée coréenne est balayée et doit appeler à l’aide les troupes de la Chine des Ming qui bloque les envahisseurs. Sur mer en revanche les vaisseaux-tortues infligent à la flotte japonaise des revers retentissants qui isolent les forces d’invasion. Autour de Toyotomi les nuages s’amoncellent : mort de son 1er enfant et de sa mère ; climat de suspicion qui va de pair avec la lente dégradation de la santé de Toyotomi. Son neveu est ainsi exécuté suite à une rumeur de complot ; le maître de thé tombe en disgrâce et est contraint au suicide. Toyomi exige de tous les grands seigneurs des serments de fidélité parfois scellés de leur sang. En 1598 le second unificateur décède alors que l’expédition de Corée est encore en cours. Autour de sa dépouille les vassaux et grands seigneurs songent déjà à se disputer sa succession. C’est l’un d’eux Tokugawa Ieyasu qui remportera la querelle de successions éliminant ou ralliant à sa cause les cinq régents désignés par Toyotomi Hideyoshi pour gérer l’empire le temps de le jeune Totomi Hideyori, l’héritier grandisse. Tokugawa remporte en 1600 l’indécise bataille de Sekigahara qui le porte au pouvoir. En 1614 il attaque l’héritier du clan Toyotomi réfugié à Osaka : le jeune prince et sa mère sont contraints au suicide tandis que son fils et tous les survivants du clan sont massacrés.

Ce parcours ressemble à celui du conquérant macédonien. En effet entre les deux hommes tissent d’incroyables similitudes. D’abord leur carrière est marquée par un début commun : l’assassinat de leur mentor (le père d’Alexandre) ; et une fin commune : dans les deux cas leur empire ne leur survit pas, le fils d’Alexandre (Alexandre IV) est assassiné par son tuteur Cassandre qui élimine aussi sa mère Roxane et Olympias sa grande mère et mère d’Alexandre. Ensuite leur œuvre est aussi grandiose tant par la rapidité des conquêtes, leur audace et leur courage personnel que par leurs œuvres juridiques et de réformes. Les deux hommes exercent aussi un pouvoir à la fois dur, violent (la répression des chrétiens par Toyotomi, les massacres des tribus rebelles par Alexandre) et très pragmatique (l’intégration des vaincus à leur pouvoir). Enfin la fin de leur vie est marqué par le climat de conspiration et de paranoïa (Alexandre fait mettre à mort Parménion, Philotas et tue dans un accès de rage Claitos) et par un projet de conquête grandiose et non abouti à savoir le projet du macédonien de conquête de l’Ouest de la Méditerranée et/ou de l’Arabie.

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