On peut tromper l'histoire à condition de lui faire de beaux enfants
L'opération chromite a été le premier tournant de la guerre de Corée. Un débarquement audacieux à Incheon sur les arrières de l'armée nord-coréenne concentrée au sud-est autour de la poche de Busan. Une attaque surprise qui chasse les nord-coréens du Sud de la péninsule et semble annoncer la chute finale du régime de Pyongyang avant l'arrivée des Chinois. Le réalisateur Lee Jae Han décide en 2016 d'en faire le sujet de son 7è long métrage engageant Liam Neeson pour jouer MacArthur.
Le film se décompose entre deux grand thèmes : une partie sur la préparation du débarquement centrée sur la personne de Mac Arthur et de ses efforts pour convaincre ses supérieurs de la faisabilité de l'opération ; une seconde centrée sur l'opération d'infiltration menée par des agent sud-coréens dans la zone d'Incheon s'inspirant vaguement d'une vraie mission, "Trudy Jackson", menée par l'agent étatsunien Eugène Clark et une équipe de sud-coréens. Cette seconde partie concentre l'essentiel de la durée du film offrant une construction en trois actes : l'infiltration dans la ville de Incheon, la traque par les nord-coréens et l'accomplissement finale de la mission.
Le film commence bien dans sa première moitié. La partie espionnage fonctionne, du vol des uniformes au jeu de dupe face à un officier nord-coréen suspicieux. Le commando doit relever un défi de taille : voler la carte relevant la position des mines mouillées dans la baie d'Incheon dans le bureau de l'officier en chef. Lee Jae Han réussit à reconstituer l'atmosphère de cette Corée du Sud sous occupation : suspicion, collaboration propagande, répression et résistance. Sorti en 2016 le film multiplie les clins d'oeil non seulement à la situation géopolitique récente de la péninsule mais aussi à l'occupation de villes par l'Etat Islamique. L'accent en effet est mis sur les exécutions publiques ou l'ambiance de surveillance permanente. Pourtant au bout d'une heure toute cette construction s'effondre.
D'abord le film pâti d'un choix artistique contestable. S'agit-il d'une reconstitution fidèle de l'opération ou d'une fiction nationaliste ? En effet le personnage de MacArthur et l'opération de débarquement sont réduits à de la figuration. On passe très vite sur les débats qui ont agité le haut commandement sans parler du débarquement "survolé". Toute cette partie ne passionne pas le cinéaste et cela se voit : les dialogue sont faibles, les effets numérique catastrophiques. Les Américains ne sont présents que pour faire illusion. Le pire arrivant dans la dernière partie du film où le petit commando sud-coréen sauve à lui seul le débarquement. Ceci nous amène sur le second défaut du film. Il se transforme en film d'action lambda glorifiant les sud-coréens échappant à toutes les poursuites des nord-coréens et capables avec un char de sauver toute l'opération. On touche là tout le problème de ce projet révélé par son titre : opération Incheon ou souvenirs de guerre. Le film n'est ni l'un ni l'autre. Il échoue à reconstituer une opération de débarquement et d'infiltration passionnante, il échoue à offrir une bonne fiction d'espionnage et de guerre. Le regret est de taille d'autant plus que tous les éléments étaient là pour offrir un bon film. Un excellent casting, que ce soit pour les agents sud-coréens que pour le fantastique officier du Nord. De même des idées d'écriture son esquissées : l'incrédulité des Etats majors, que ce soit à Pyongyang pour envisager la possibilité d'un débarquement, qu'au Japon pour soutenir la faisabilité de l'opération agissant comme un miroir. Il y avait matière à rajouter du drame et de la tension.
En défintive ce long métrage est une déception. Un sujet passionnant malmené par une vision nationaliste de l'histoire.
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