Veuf, ouvrier dans le textile, Lee sang Hyeon vit une existence simple qui pourrait sembler terne sans le rayon de soleil que représente sa fille de 15 ans. Un soir alors qu'il ne peut aller la chercher, la jeune adolescente est kidnappée par une bande de jeunes qui la séquestre, la viole et la tue. Son corps est retrouvée dans les bains publics et alors que l'enquête progresse lentement un mystérieux informateur révèle au père mort de chagrin l'adresse d'un des assassins. Pour Lee début une impitoyable chasse à l'homme.
Attention film brutal adapté d'un roman de Keigo Higashino, la maître japonais du polar !! L'histoire se construit à travers le face à face entre la vengeance froide d'un homme simple confronté au pire des crimes et l'action d'une police dépassée, partagée entre son souci de stopper ce cycle de vengeance pour sauvegarder sa réputation et le dilemme moral d'avoir à arrêter le père d'une victime. Le film offre dans cette trame une série de scènes intenses, dérangeantes comme savent le faire ces polars asiatique. On pense notamment au moment où le père regarde le film du meurtre de sa fille ou celui où des parents d'un des bourreaux tentent d'en faire une victime. Le traitement de la police est à nouveau très critique. A part l'inspecteur désabusé par la violence du monde et proche du père, toute l'institution semble plus soucieuse de sauver sa réputation que d'essayer de rendre la justice. Pourtant ce n'est pas tant par l'histoire que Broken captive mais par l'ambiance générale.
Le film se situe entre le glaçant Confession et Battle Royale. En effet le thème abordé c'est la cruauté gratuite des adolescents et le pouvoir des images. Le film repose à nouveau la question de la délinquance des jeunes, de leur dérive violente et de l'impuissance de la justice. Le film nous assène une terrible claque en plongeant dans le monde pas si rose des jeunes. Viol filmé et revendu, pornographie juvénile, décalage comportemental tout y passe. Il déchire le voile d'une réalité terrible, désenchantée dont la dureté semble effacée par le filtre des écrans à travers lesquels ces crimes sont consommés. Car c'est bien de cette vie virtuelle édulcorée qui est ici pointée du doigt. Ont-il conscience du mal qu'ils infligent ces bourreaux ? Le film repose le débat de la justice à imposer à ces mineurs qui malgré la violence, la répétition des viols ne risquent que 7 ans de prison maximum. Comme dans le film Confession, Broken interroge sur l'excuse de minorité et nous conduit à prendre progressivement le parti pour le père. Jusqu'à un final époustouflant, surprenant et finalement plus « optimiste » que celui de Confession.
Ce thème implacable est servi par une réalisation sobre, intelligent, alternant la lenteur (la traque dans la montagne) et les scènes rythmées (la poursuite dans la ville). Le film nous permet de glisser par la mise en scène dans la peau du père et de le suivre dans ses explosions de violences animales face à la perversité des bourreaux. Les plans sont terriblement beaux surtout ceux de la station de ski. Le jeu des acteurs est lui aussi admirable entre la tristesse, la haine du père, la lâcheté, la distanciation des bourreaux et le dilemme moral de l'inspecteur.
Broken, comme Confession, réussit à nous plonger dans des affres de questionnement et à remettre en question nos certitudes. Un nouvelle perle du film noir coréen.
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