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Outrage beyond

Outrage Beyond, critique

Fort du succès du premier opus, Beat Takeshi revient clore son histoire sur les yakusas. L'histoire débute par une découverte macabre. La voiture du secrétaire d'un ministre est retrouvée dans la baie de Tokyo. Les yakusas relancent à nouveau leur guerre tandis que la police décide de s'intéresser de près à un clan dont la position dominante inquiète. Dans le même temps Otomo finit de purger sa peine et sort de prison. Mais on ne peut jamais quitter le monde de la pègre.



Comme dans la série des Elections de Johnnie To qui décrivait l'univers de triades chinoises, Outrage se construit en deux temps. Le premier film (voir la critique ici) aurait pu s'intituler "la fin de l'innocence" et s'employait à démonter méthodiquement l'imaginaire honorable. Dans Outrage beyond, Takeshi Kitano approfondit l'écheveau d'alliances, de trahisons en  complexifiant l'intrigue par l'irruption du policier corrompu et du yakusa passé pour mort (Otomo). Mais il introduit une variante : un deuxième clan plus old school entre dans la partie. C'est cela la force de cette suite. La description de deux terrains où prospère le crime : un clan "jeune" qui a misé sur la crise économique, la corruption pour devenir une quasi multinationale du crime ; de l'autre un vieux clan qui n'a pas modifié son fonctionnement (l'honneur, la manipulation discrète priment sur l'argent). Du moins en apparence car les clans sont soumis aux mêmes règles contradictoires. L'affrontement jeunes/anciens, l'arrivisme face à la fidélité, l'humiliation constante. Ce monde des gangsters broie irrémédiablement. Soumission au chef, violence sur ceux qui sont à ses ordres, telles sont les règles. Pourtant dans cette mécanique bien huilée, deux grains de sable viennent tout faire dérailler. D'une part le policier. Personnage secondaire dans le premier volet, il devient essentiel dans la suite. Corrompu, méprisé par les yakusas, il a pourtant son propre projet, à la fois oeuvre de salubrité publique (faire le ménage parmi les clans les plus violents), et oeuvre de libération personnelle. De même Otomo vient bouleverser l'univers clos des yakusas. Que cherche-t-il ? la vengeance, un peu ; remonter un clan, peut être ? sa liberté, à coup sûr et la fin du film est une belle surprise. Il change les règles pour son propre intérêt et offre une fin plus optimiste.

Pour cette suite, Kitano fait à nouveau un travail admirable. Scène du restaurant avec une caméra circulaire, scène de l'ascenseur, jeu sur le son (les détonations), il montre que son talent, son inventivité sont intacts. Les plans sont nets, beaux, chirurgicaux. Il maîtrise parfaitement le rythme pour à la fois nous emmener dans une sombre affaire de trahison au développement lent et nous offrir des fulgurances de violence pure et soudaine (la scène finale par exemple). La mort est présente et Kitano nous dépend ou plutôt nous suggère toute une galerie d'exécutions perverses. La violence est plus présente dans des scènes de dialogue où l'hypocrisie rivalise avec la lâcheté. Le film offre cependant de petites pointes d'humour inattendues: «Pourquoi est-ce que tout le monde vise mon ventre »

 Outrage Beyond clôt (?) brillamment ce retour au source de Beat Takeshi. Sombre, dense, il montrer que l'homme n'a rien perdu de son style si singulier à la fois lent et parsemé d'éruptions de violence froide. 




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