A redécouvrir

a Joker Game

Asie, 1930, alors que les canons du second conflit mondial n'ont pas encore retenti, le lieutenant colonel Yuki a mis en place la redoutée et secrète agence D, agence de renseignement au service du Japon. Toujours à la recherche de nouvelles recrues, ils sauve du peloton d'exécution un jeune soldat condamné pour insubordination. Formé, entraîné, il est envoyé pour sa première mission dans une ville d'Asie du Sud pour récupérer le carnet d'un scientifique allemand passé entre les mains de l'ambassadeur des Etats-Unis et convoité par toutes les agences de renseignement du monde. Un jeu mortel s'engage entre l'agence D, les services britannique, des voleurs free lance et la branche radicale de l'armée impériale.





Inspiré d'une série de romans à succès, Joker Game est un projet hautement dangereux plaçant comme héros de l'intrigue des espions à la solde de l'empire du Japon des années 30. Dans un contexte de tensions mémorielles entre les pays d'Asie, il y avait beaucoup à redouter de cette uchronie. A tort car contrairement à certaines productions chinoises trop nationalistes, Joker Game reste subtile et se construit comme un très bon film de genre.

En effet la première qualité c'est son côté James Bond décomplexé, fun et drôle. Le film nous offre d'excellentes séquences d'infiltrations, de poursuites, de combats en milieu clos renforcé par son lot de rebondissements. Sans jamais se prendre au sérieux, l'ensemble est cool. Ainsi on apprécie de voir les bad guys over the top (l'agent britannique !!!) et les gadgets à répétition.  Autre qualité c'est que c'est un James Bond à la sauce Batman. Je m'explique l'agence D a un principe : "ne pas tuer, ne pas mourir". Résultat si les combats sont nombreux, les morts sont rares. On rit alors beaucoup et on en oublie presque le contexte des années 1930. Le film ressemble par là  beaucoup au dernier film de Guy Ritchie The Man from Uncle, ressemblance accentuée par une scène - l'évasion - où la voleuse préfère prendre son temps pour se rhabiller plutôt que d'aller aider son camarade (séquence rappelant le moment ou Henry Cavill préfère déguster un bon panier repas que d'aider son acolyte sur le lac..).

La seconde qualité du film c'est son intrigue très bien ficelée du début à la fin avec l'importance de détails venant enrichir, accélérer le récit. Le film ne souffre d'aucune longueur et profite d'un rythme qui vous tient en haleine jusqu'au bout. Il y a quelques ficelles un peu grosse (l'agent double) mais à partir d'un scénario simple il nous offre une histoire qui se tient jusqu'au bout. Notons la qualité du jeu des acteurs. L'agent japonais vraiment cool, sensible à l'aise aussi bien dans sa langue natale qu'en anglais incarné par Kamenashi Kazuya, une star de la J pop (encore une). La voleuse japonaise, sublime et qui nous bluffe en alternant les passages de grandes fragilités (la scène de la photographie) et ses talents badass ; jouée par une autre star de la J Pop, la sublime Kyoko Fukada. Sans oublier Iseya Yusuke, acteur émérite qui apporte toute sa classe au rôle du colonel Yuki. Et derrière la caméra le jeune réalisateur Yu Irie fait le travail. Sans tout révolutionner, les scènes sont claires, lisibles et s'offrent à quelques moments des passages originaux (les draps). 

La dernière qualité du film et c'est une surprise c'est le sous-texte politique. Sans donner de date on sent que l'action se passe avant 1937, avant le basculement dans l'horreur. Et le film dès le début pointe du doigt ce Japon au bord de l'abîme  (la violence de l'officier), l'affrontement entre l'agence D et ces militaires extrémistes évocation claire de la sinistre armée du Kwantung. Connaissant le tour qu'a prise l'histoire il serait très intéressant de voir comment vont évoluer les intrigues suivantes.

Joker Game est au final intéressant, risqué et bien maîtrisé. Sans crier au chef d'oeuvre car on sent encore de la retenu chez ce réalisateur (au niveau des scènes d'action), ce premier opus donne envie d'en savoir davantage sur l'avenir de cette agence.


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