Ghost in the shell occupe une place à part dans l’animation japonaise. A l’origine c’est un manga de Masamune Shirow publié dès 1989 mettant en scène un univers cyberpunk. Il va devenir quasi culte en 1995 avec son adaptation en long métrage par le grand Mamoru Ishii. Depuis la série continue une histoire unique faite d’exploitations intelligentes du concept : un second long métrage du même Oshii en 2002 Ghost in the shell innocence et toujours aussi splendide, une série Stand Alone Complex prenant brillamment la suite du second film, un nouveau manga et en 2013 des O.A.V s’intéressant aux débuts du personnage central (le major) et le son équipe, compilés ensuite en 2015 dans une série de 10 épisodes Ghost in the shell arise :alternative architecture servant d’introduction au long métrage sorti la même année. C’est cette préquelle que nous allons ici commenter.
Ghost in the shell a marqué les esprits par ses intrigues complexes mêlant corruption, lutte de clans, manipulation de l’esprit et réflexion sur ce qui distingue l’homme de la machine. Dans son univers en effet, l’optimisation des êtres humains est devenue monnaie courante : corps cybernétiques, connexion des cerveaux directement au web. Et comme l’intelligence artificielle et les robots ont aussi connu un développement rapide, la frontière entre I.A et être conscient devient flou. C’est pourquoi un mot est apparu : le ghost qui différencie l’humain de la machine, son âme par opposition à ses souvenirs qui peuvent être manipulés. C’est sur ce principe que toutes les œuvres de l’univers tissent leur toile, sur les infinies manipulations possibles ou tentées sur l’esprit dans l’espoir de dupliquer, manipuler, pirater le ghost.
La série Ghost in the shell Arise pousse à nouveau très loin l’intelligence du scénario et il est conseillé de la regarder avant de voir les O.A.V (petits long métrages) sortis avant. En effet la série possède 2 épisodes inédits (les deux premiers) qui éclairent toute l’architecture. En effet dans Ghost in the shell Arise, la section 9 est aux prises avec un hacker de génie, Five Starter, inventeur d’un virus affectant les cybers cerveaux et permettant de prendre le contrôle de plusieurs individus. Les épisodes décrivent la traque de ce cyber criminel mais en ajoutant une construction alternative. Les épisodes 3 à 8 sont des flash backs montrant comment en parallèle de la lutte contre ce cyber criminel encore flou l’équipe de la section 9 est mise en place. Et on prend beaucoup de plaisir à apprendre d’où vient le major, qui était Batou et toute l’équipe. Chaque épisode est dense et fonctionne en duo : il y a en fait 5 grandes intrigues tournant autour de cette enquête, de luttes industrielles et de manipulation politique (excellent final). Les épisodes sont ainsi dans la pure tradition et obligent à être bien concentrés. C’est compliqué mais tout s’éclaire au fur et à mesure malgré le talent des réalisateurs pour toujours nous plonger dans le doute. En filigrane de cette série on peut lire à la fois des thématiques anciennes propres au Japon (la collusion entre politique et l’entreprise, la modernité sans frein) mais aussi d’actualité autour des débats sur le pacifisme et la remilitarisation de l’archipel.
Techniquement la série est irréprochable. L’animation fluide, dynamique sert parfaitement les scènes d’action inventives (poursuite, combat contre des méca, infiltration…). La diversité des lieux, le sens du détail (les reflets par exemple), la poésie, le flou permettent de ressentir ces explorations de nos psychés. Ghost in the shell aime distordre notre réalité, nous faire expérimenter la perte de contrôle de notre conscience. Sans égaler le formidable Ghost in the Shell Innocence et sa parade onirique, cette nouvelle série joue à fond sur l’incarnation de l’univers virtuel, sur l’altération de la conscience. Et c’est d’autant plus fort que l’un des présupposés de la série laisse à la base peu de place au sentiment : peu d’émotion filtrent des visages cybernétiques. Et c’est par de subtils effets sur le regard, sur la lumière que les réalisateurs donnent de la vie à ses visages figés.
Au final Ghost in the shell arise, alternative architecture réussit au de-là de nos plus folles espérances à décline un nouvel arc fascinant, questionnant audacieux par sa mise en scène de la robotisation au service d’une militarisation accrue de la société. Et dire qu’au regard de la « fin », ce n’est qu’une mise en bouche avant le long métrage sorti en 2015 au Japon sensé boucler l’ensemble
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