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critique de Crime Story

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Vous croyez que la carrière de Jackie Chan s'est résumée à la kung fu comedy survitaminée. C'est vrai mais l'artiste multi-carte s'est aussi tenté à des films plus sombres dans le but de gagner ses galons d'acteur complet. Crime Story s'inscrit dans cette tentative d'intrusion dans le film plus sérieux inspiré par la série des Lethal Weapon et le personnage torturé de Martin Riggs.


Hong Kong confidential

En 1993 quand sort crime story Jackie Chan enchaîne les succès : Opération Condor, Double Dragon, Police Story. Alors qu'il lorgne déjà sur de nouveaux projets hollywoodiens, il se lance dans un nouveau film policier d'un autre genre. L'histoire de Crime Story se construit sur une trame simple.  Un homme d'affaire important soupçonne un groupes de malfrats de vouloir l'enlever. Il demande à la police de le protéger et celle-ci envoie l'inspecteur Jackie. Mais il échoue à empêcher la tentative d'enlèvement qui coûte la vie à un motard de la police. L'inspecteur décide de retrouver les kidnappeurs et de venger l'agent mort. Sa poursuite se transforme dès lors en affaire personnelle. 

Dans Crime Story, ne pas chercher pas de pitreries et autres facéties. Le film est sombre, pessimiste. Jackie Chan a décidé de partir dans le noir très influencé par la série des Lethal Weapon. Dès le début, on le voit sortir de chez sa psy tentant de soigner le traumatisme d'une fusillade récente. Référence totalement assumée à Martin Riggs. Le réalisateur offre à Jackie Chan un rôle dense de flic incorruptible, ne tolérant pas la trahison ni les malfrats. Le personnage est over the top, toujours sur la brèche, encaissant les coups au propre comme au figuré (une des ses jambes sera presque broyée lors de la scène de poursuite lui occasionnant une des ses pires blessures). La mort des policiers l'entraînent dans des affres de la culpabilité tandis que la découverte de la corruption déclenche des réactions violentes. 

Voyage au bout de la nuit 

L'affrontement intérieur de l'inspecteur met en exergue le dilemme moral des policiers, leur petit salaire  face aux sommes folles des truands. Se pose très souvent la question  à quoi cela sert-il de défendre la justice ? D'autant plus que le film reste volontairement flou sur cet homme d'affaire dont on se doute que l'argent n'est pas forcément propre. Pourtant Jackie reste droit dans ses bottes et porte au firmament la figure du policier indomptable et juste. Il semble d'ailleurs que tout en s'inspirant de Lethal Weapon, Crime Story ait inspiré à son tour le film hollywoodien La Rançon.



Volontairement dramatique, le film enchaîne quelques scènes de bravoures moins virevoltantes que d'habitude car Kirk Wong le réalisateur recherche le réalisme. On trouve ainsi une audace visuelle proche des Police Story mais beaucoup plus brute et violente. Car le film s'inspire en effet d'une histoire vraie  (d'où les nombreuses incrustations de dates, lieux) ce qui limite l'intérêt des cascades. De même l'intrigue se déplace de Hong Kong à Taïwan en dénonçant l'opacité bancaire et l'impact des nouvelles technologies de la communication sur la circulation de l'argent. Côté casting, une des surprises avec la prestation de Jackie Chan  c'est Kent Cheng vu dans Il était une fois en Chine dans un rôle à contre emploi cynique, décomplexé, immoral. Sa bonhomie et sa faconde enrichissent l'intrigue, les double jeux. 

Un essai à moitié transformé

Film ambitieux, Crime Story n'atteint cependant que partiellement ses objectifs. Le premier souci c'est la réalisation, bonne pour les scènes d'actions mais moins inspirée pour les scènes dramatiques. On pense notamment à la scène du début avec la psy assez mal insérée à l'ensemble (attention la VF est catastrophique). De même le film manque de subtilité à trop vouloir iconiser le courage et l'abnégation de Jackie Chan. Il en résulte des scènes (celle du policier blessé conduit à l'hôpital) qui perdent toute leur force.


L'écriture et l'utilisation des personnages sont en plus à certains moments. maladroites. La psychologue est par exemple totalement sous employée et c'est dommage car son potentiel dramatique est fort. Rappelons-nous dans Infernal Affairs comment cette figure sublimait les questionnement de l'infiltré. Il en va de même pour le personnage joué par Jackie. Il est trop. Il lui manque ce qui fait la qualité des films de Hong Kong : le développement de la vie personnelle du héros. Ici rien de tout cela. Il ne vit que pour son travail. 

Au final un film généreux mais qui souffre d'un excès de sérieux. En voulant assombrir à l'envie son histoire, le réalisateur étouffe ses intentions formelles. Retrouvez ici tous nos articles sur Jackie Chan.


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