La Chine et le Japon ont entretenu des relations fortes depuis plus de deux millénaires. Jusqu'à la fin du XIXè siècle, le Japon est en position d'élève face à la Chine. Outre l'écriture et la religion, l'administration, l'architecture sont fortement influencées par la cour impériale de Pékin. L'empire du milieu est admiré et copié, vu comme la source de la modernité. Un exemple : lorsqu'en 1866 des marins chinois provoquent des émeutes dans le port de Nagasaki, les autorités japonaises réagissent doucement de peur de froisser son puissant voisin. Lé révolution Meiji va transformer ce rapport et faire du Japon le modèle pour les réformateurs chinois.
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révolutionnaires chinois réfugiés au Japon |
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Zhou Enlai en 1919 |
La cause première de ce revirement est un coup de tonnerre. Le Japon de Meiji écrase la Chine des Mandchous lors de la guerre sino-japonaise de 1894-1895. Taïwan est donné au Japon qui obtient en outre les mêmes privilèges commerciaux que les occidentaux. Pour le Japon à l'image du ministre Mutsu Munmitsu, cette victoire symbolise la modernité japonaise face à la tradition chinoise. Dans le vocabulaire employé sur l'archipel, la Chine est un pays malade, pas encore une proie mais une nation à guider. Du côté chinois aussi les mots changent. Car le destin de la Chine et du Japon suivent deux trajectoires radicalement opposées. Confrontés à l'appétit colonial des Occidentaux, le Japon a su maintenir son indépendance et se développer alors que la Chine suite à des guerre désastreuses voit ses provinces littorales et ses principaux ports occupés. Avec la victoire japonaise de 1894-1895, nombre de jeunes intellectuels réformistes réclament l'instauration d'un régime moderne calqué sur les réformes Meiji. Un exemple célèbre : Zhou Enlai, fondateur historique avec Mao du Parti communiste chinois passe 3 ans au Japon (de 1917 à 1919) fréquentant l'université de Kyoto où il suivra ou entendra parler d'Hajime Kawakami, figure historique de la pensée marxiste en Asie. La cour des Mandchous s'intéresse aussi à l'archipel. Par le Japon transite en effet nombre de savoirs dits "modernes" venus d'Occident. C'est ainsi qu'en 1908 la dernière impératrice promulgue le Qinding Xianfa dafang, principes d'une constitution impériale, organisant une future monarchie constitutionnelles inspirée par celle de Meiji. Ce flux entre les deux nations ne s'est pas limité aux seuls courants de pensée. Les militaires chinois révolutionnaires et impériaux vont se former au sein de l'académie militaire impériale japonaise. Un des ses étudiants destinés à avoir une carrière brillante n'est autre que Chiang Kai Chek qui servit dans le régiment de Takada de l'armée de Niigata.
En plus d'être un modèle, le Japon de ce début de XXè siècle servit de terre d'accueil aux révolutionnaires asiatiques, majoritairement chinois. En effet la police mandchoue malgré la déliquescence du régime demeure efficace. Et même dans les concessions internationales de Shanghai, les opposants ne sont pas à l'abri. Le Japon, la ville de Nagasaki en particulier, offre un abri sûr. Reliée à la Chine grâce aux messageries maritimes et au télégraphe sous-marin, la ville devient la base d'où les rebelles diffusent leurs idéaux et collectent leur fond Sous l'oeil attentif et bienveillant de la police japonaise qui surveille tout ce beau monde mais sans les arrêter ni les livrer au chinois. Dans ce refuge inexpugnable, Sun Yat Tsen, le père de la république chinoise installe sa base après son exil C'est au Japon que sa renommée va toucher toute l'Asie. En effet le journal Kyushu Nippo (nouvelles de Kyushu) publie le récit de son arrestation en 1896 dans la légation chinoise de Londres. En 1902 Miyazaki Toten proche ami de Sun Yat tsen publie son autobiographie. L'ouvrage traduit par la suite en chinois sous le nom de Sun I hsien (Sun Yat Tsen) accentue le prestige du dirigeant. En 1905 Sun fonde la ligue d'union pour la révolution à Tokyo et diffuse largement en Chine son jounral : le journal du peuple. Le Japon l'accueillera à nouveau en 1913 lorsque deux ans après la révolution qui a mis fin à l'empire, Sun doit fuir suite à la prise de pouvoir et à la tentative monarchiste du général Yuan Shikai qui meurt en 1916.
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Chiang Kai Chek (droite) et Inukai Tsuyoshi (future premier ministre du Japon) en 1929 |
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