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Dragon Blade critique

Quand Gladiator rencontre La Princesse du désert

Dire que Dragon Blade a affolé le monde du cinéma est un euphémisme. Imaginer un casting réunissant Jackie Chan, Adran Brody, John Cusack, la française Lorie dans une super-production chinoise aux confins de l'Asie Centrale à l'époque de la Rome Antique. Voilà planter le décor de ce méga péplum hyper casse gueule dans une période où les blockbusters chinois fricotent trop souvent avec le nationalisme. Pour quel résultat ?


Il était une fois le long de la route de la soie...

L'histoire se situe au coeur de la route de la Soie. Une équipe d'archéologue découvre une ancienne cité romaine et remonte dans le temps pour comprendre son histoire. Au 1er siècle avant notre ère Jackie Chan incarnant Huo An est un orphelin Hun recruté par l'empereur chinois pour veiller au maintien de la paix dans cette région convoitée par les tribus nomades et les empires. Piégé dans une étrange affaire de vol d'or, il est exilé avec ses hommes dans une cité frontalière et rencontre une colonne de soldats romains en fuite  commandé par John Cusack (Lucius). Entre les deux hommes, l'affrontement est inévitable. Mais  la survie du jeune Publius traqué par son frère  Tibérius (Adrian Brody) les oblige à coopérer. Une curiosité et une amitié naissent alors.  

Pour bien comprendre le  postulat du film il faut savoir qu'il s'appuie en la romançant outrageusement sur une histoire vraie ; celle des légionnaires de Crassus faits prisonniers en - 53 à Carrhes par les Parthes puis recrutés après de nombreuses péripéties par l'empereur de Chine qui les installa dans une de ses villes frontières. Alors le film va diviser pour sa libre interprétation de l'histoire mais à côté du traitement par Hollywood de l'histoire en particulier de l'Antiquité ( voir les navrants 300, 300 la naissance d'un empire, Pompéi, Gods and Kings...) c'est une production réussie. 

Une réalisation soignée

D'abord parce que Daniel Lee sait filmer et il tire profit à merveille des paysages désertiques. Le film lorgne largement vers l'image des western américain, large plan sur le désert, omniprésence du vent. Il rend compte en quelques scènes de l'immensité de ces déserts d'Asie Centrale, véritable autoroute, corridor et tunnel vers l'infini. Le long chemin des légionnaires en fuite est une réussite. Autre atout chez Daniel Lee, il s'appuie sur beaucoup de décor naturel et n'abuse par des CGI et reconstructions en 3D. C'est tant mieux car malgré le budget conséquent les textures restent encore trop artificielles. Mais ne soyons pas trop dur il y a sur ce film un vrai progrès et quand on voit les scènes 3D de Exodus il n'y a pas de quoi rougir.

Ensuite le réalisateur évite l'écueil de l'anachronisme chorégraphique. Bien sûr il y a de merveilleuses scènes de kung fu avec Mister Jackie Chan, des combats au sabre virevoltants mais il tâche aussi de rendre compte des formes de combats romaines ; boucliers, tortues... Et la très réussie séance des entraînements/duels permet une confrontation entre les deux styles sans qu'aucun ne prennent le dessus.

Une jolie histoire

Cette dernière remarque nous amène à l'autre point  réussi du film. Le message. Point de nationalisme, de triomphalisme. Le film véhicule un message d'harmonie où la ville de Regum devient le creuset culturel, le symbolisme de syncrétisme. Alors évidemment le réalisateur veut tellement faire passer ce thème qu'il manque parfois de subtilité et abuse des effets (l'école, la solidarité entre les ouvriers..).  Il alourdit la narration . Mais des scènes comme celles des chants viennent magnifier l'ensemble et donner de sacrés frissons.

En terme de scénario, c'est pas mal mais.... Le prologue avec les archéologues ne sert pas à grand chose et fait même très peur  : on se croit en plein Tomb Raider le film et fait craindre le pire dès les premiers minutes. Ensuite le plan de Tibérius pour discréditer Huo An et justifier les différentes trahisons n'est pas non plus utile. Car il y a assez à dire entre les luttes tribales, l'histoire du jeune Publius, le rôle des Parthes (pas assez exploité). Au final tout de même on suit très bien la trame grâce aux acteurs.

 A tous chapeau bas. Un telle implication fait plaisir. D'abord Jackie Chan est à nouveau bon et dynamique. Son rôle de héros l'amène à avoir toujours des positions nobles mais il n'en fait pas trop et surtout il laisse une large place aux stars internationales. John Cussack est superbe. Difficile de l'imaginer tenir un rôle aussi physique et fort. Il incarne avec conviction cet officier sans foyer dont la mission est de protéger le jeune Publius. Même constat pour Adrian Brody : un vrai grand rôle de méchant sans cabotinage  assorti de superbes scènes de combat. Quant à Lorie, dans un tout petit, rôle elle est sublime en reine de Parthe : le réalisateur exploite à merveille ses yeux et ses quelques scènes de dialogue sont parfaitement jouées. Pour bien apprécier le film, il faut aussi parmi les libertés prises avec l'histoire accepter celles de la langue. Tous les acteurs parlent anglais et dans le film apprennent à une vitesse folle à parler la langue de l'autre. 


Bilan plutôt positif pour ce péplum chinois audacieux. Des maladresse dans la narration, des effets spéciaux encore perfectibles mais un film ô combien généreux, travaillé et non manichéen. Une drôle de surprise.

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