Les revenants version japonaise
Un petit village japonaise est le théâtre d'événements étranges. Des morts reviennent à la vie. Un enfant décédé dans les années 1940 réapparaît devant sa mère ; une restauratrice retrouve son époux ; une star de la J-pop, Rui, vient donner un concert géant à tous ses fans. Cette situation étrange suscite la curiosité et l'inquiétude des pouvoirs publics. Une enquêteur, Heita, ayant grandi dans le village est envoyé sur place.
Un sujet très maîtrisé
Ce film est un petit bijou. D'abord dans le traitement de ce thème typique du 7è art et souvent malmené. Pas de sentimentalisme excessif, de fantastique outrancier ou d'explications alambiquées, chaque histoire est traitée avec délicatesse. La mère âgée redécouvre son fils tel qu'il était à sa mort, une veuve qui s'est reconstruite fait face à son ancien mari. Le thème évite tout traitement stéréotypé. Le film pose une double question : que feriez vous si un être cher revenait d'entre les morts ; que feriez-vous si vous étiez l'un de ses revenants ? Le deuil est au coeur de l'oeuvre avec son cortège de remords, de reproches, d'incompréhension. Peut-on se reconstruire une nouvelle fois ?
Le film baigne dans une mélancolie douce amère. Les habitants se partagent entre joie et déstabilisation. Ce qui prédomine c'est une sensation : l'amour d'avoir espéré revoir les disparu doit se muer en l'amour d'une vie présente comblée et pleinement vécue. C'est en cela que la position des revenants est forte et originale. Le retour même bref porte une lumière d'espoir à l'image de cette mère sourde-muette qui revient et découvre que sa fille est devenue enseignante pour les sourd-muets. Tout se passe comme si les morts avaient autant besoin que les vivants de cette seconde chance pour pouvoir s'en aller apaisé.
Porté par un scénario intelligent et des acteurs parfaits
Ensuite le film profite de sa partie enquête. Il plonge dans l'univers animiste du Japon, le rôle des forêts. Sans s'égarer dans des thèses absurdes, il conserve un ton réaliste rendant l'ensemble criant de vérité. Il prend même une teinte très ghibli dans la réalisation des plans notamment en forêt qui rappelle des scènes de Princesse Mononoké. Tout tourne autour du magnétisme d'un étrange cratère. Et le réalisateur Akihiko Shioda joue autour de ce mystère. Car en réalité ce n'est qu'un prétexte pour raconter autre chose. Et c'est vers la moitié du film que la grande histoire rencontre la petite histoire.
Alors que l'enquête de la mystérieuse réapparition semble être l'enjeu principal, le scénario nous offre un retournement intéressant concernant l'enquêteur. Cette intrigue dans l'intrigue permet au film de gagner à nouveau en force, en pathos. Sans oublier l'autre intrigue autour de la star J pop, depuis la scène d’ouverture où l’on ne reconnaît que sa main tatouée
caressant le piano aux côté de son mari revenu de l’au-delà, jusque dans
le final du fil. Celui-ci s'élève lors d'un concert géant en plein air dans les stratosphères du romantisme et de mélancolie jusqu'à un apothéose d'un optimisme fou : vivez et ne regrettez rien. La construction de cette longue scène est riche en métaphore religieuse avec les cohortes de véhicules se dirigeant vers le lieu du spectacle.
Pour de tels enjeux, la partition des acteurs est essentielle. Elle est encore une fois exemplaire, tout en retenu sans cabotinage. Parmi un casting remarquable, il est à noter la présence au générique de Tsuyoshi Kusanagi, star du groupe de J pop SMAP qui incarne brillamment le rôle de l'inspecteur Heita. De même Kou Shibasaki joue et interprète la chanteuse Rui dans le film confirmant ses talents de chanteuse et d'actrice. C'est d'ailleurs une des grandes différences entre le cinéma occidental et asiatique que de parvenir à la fois à donner des rôles forts à des chanteurs de boys band et d'être capable de traiter simplement et intelligemment le thème de la mort (voir à contrario Au de-là de Clint Eastwood)
Yomigaeri nous offre deux heures d'un film touchant surprenant porté par un scénario intelligent qui pourrait s'achever par ses morts "la mort vous va si bien".
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