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Park Kyung-won : l'hirondelle bleue

Park en 1933
Sa vie ressemble à l'histoire racontée par Miyazaki dans le vent se lève. L'amour de l'aviation contre vents et marées. Park Kyung-won écrivait que ce n'était que dans le Ciel qu'elle se sentait pleinement heureuse. Sa biographie c'est une autre histoire de la Corée et de l'Asie. Celle d'une Asie qui aurait pu exister sans les délires nationalistes, militaristes du Japon, le colonialisme et les guerres politiques entre communistes et démocrates. Le film récent sorti en 2005 a suscité une polémique, vaine et pourtant salutaire. Elle oblige la Corée à regarder son passé à comprendre  ces rares individus qui ont voulu dépasser les querelles entre Nations. Il en résulte un paradoxe : la plus grande pilote coréenne, la première femme pilote civile est une personne  qui suscite un fort débat voire un ressentiment. En témoigne le titre de cet article coréen sur le film : "Qui veut essayer de glorifier la pom-pom girl de l'impérialisme ?

Une rêveuse
Park est née à Daegu en 1901 dans une famille aisée et a fréquenté une école de missionnaire
Park au Japon
tenu par les Américains. Bien éduquée, elle nourrit un esprit indépendant et une passion  pour l'avion au point une fois sa scolarité finie de partir pour le Japon. C'est un choix courageux car au Japon les femmes coréennes sont victimes de préjugés : beaucoup étaient prostitués et la société restait très machiste voire raciste. Elle a juste 16 ans et sa priorité c'est de continuer à se former et de gagner de l'argent pour sa scolarité. Ces années sont marqués par sa forte curiosité : elle passe deux ans et demi au centre de formation technique de Kasahra, elle repart en 1920 à Daegu pour faire des études d'infirmière. Entre temps elle se convertit au christianisme. En 1925 elle peut enfin intégrer une école d'aviation de la région de Tokyo, pas celle de ses rêves. En effet elle avait le secret espoir de suivre les pas d'An Chang-nam le premier pilote coréen. Mais l'école qui le forma avait brûlé en 1923 lors du grand tremblement de terre. 

l'épave de son avion
Parmi une trentaine d'élèves de l'école, il n'y a que 6 femmes et une seule coréenne, elle !!!. Malgré ces handicaps elle obtient sa licence de seconde classe en 1927, puis de première classe en 1928.  Ses qualités de pilote sont remarquées et malgré un climat de plus en lourd au Japon, un racisme exacerbé, la jeune femme continue de piloter. Elle devient malgré elle un symbole pour les nationaliste de l'île. Le 19 mai elle s'envole pour Séoul et rencontre les représentants du gouvernement. Le 7 août elle est choisie pour inaugurer le vol  entre Japon et le tout nouveau Etat fantoche du Mandchoukouo.  L'aviatrice doit faire de nombreuses escales pendant les 7 jours de vol.  Elle décolle à 10h35 de l'aéroport Haneda de Tokyo  et s'écrase 42 minutes près d'Hakone sur les pentes d'une montagne. Défaillance mécanique et mauvaise météo semblent être les causes probables.  Sa dépouille est retrouvée et reçoit les honneurs d'un service funèbre magnifique au sein de l'école impérial de pilotage. 

Un tel itinéraire  questionne la mémoire des années 1930. Que reproche-t-on à Park ? de ne pas avoir fui en Chine ? de ne pas avoir fait de politique ? c'est aller vite en besogne et simplifier outrageusement les faits.  Park n'a pas collaboré. Et en cela elle est beaucoup plus propre que certains dirigeants sud-coréens des années 1950.  Ou même que ces pilotes qui ont clairement choisi le camps japonais. Ce qui gêne c'est que ce n'est pas une figure facile à cerner. Elle a certes été utilisée par la propagande nationaliste japonaise et mais elle a aussi obtenu ce qu'elle voulait : voler. Park a choisi de ne pas choisir un camp plutôt que l'autre. Sa passion c'est le vol et peu importe le drapeau.  Elle est aussi au-dessus des nations et peut être que c'est cet idéal que l'on condamne rétrospectivement. Mais elle incarne une autre Asie faite d'influences mutuelles, de co-propsérité qui a été balayée par le nationalisme. Sa mort prématurée ne nous permet pas de voir son évolution pendant la guerre.  Les critiques à son encontre rappellent aussi que les femmes sont toujours les premières cibles des règlements de compte mémoriels. On ne peut que se rappeler le sort réservé aux femmes ayant eu commerce avec l'ennemi en France, un traitement violent, brutal et lâche qui permit de taire les nombreux et autrement plus graves actes de collaboration.  

Park n'est peut être pas l'héroïne que ces temps de flambées nationalistes recherchent. Néanmoins  sa vie incroyable et trop courte est le train d'union qui manque entre les peuples d'Asie.

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