A redécouvrir

Forbidden siren

Le cinéma fantastique japonais en mode 5 étoiles

Le projet Forbidden siren en 2006 avait tout pour faire peur. Adaptation d'un jeu vidéo populaire, ambiance dans le style Ring, tout semblait indiquer un énième ersatz de film d'horreur japonais marqué par la malédiction des adaptations des jeux vidéo (Silent Hill de Christophe Gans étant la merveilleuse exception). Merveilleuse magie du cinéma nippon, cette production somme toute modeste se révèle une grande surprise, croisement réussi entre Le 6è sensRing et Shutter Island. Quelques éléments d'explications sont nécessaires en évitant en maximum les spoilers.



La petite sirène

L'histoire nous plonge dans le monde des disparitions étranges devenues légendaires. En 1580 la colonie de Roanoke en Caroline du Nord s'évapore. En 1872, la goélette Mary Céleste est retrouvée dérivant dans l'Atlantique sans traces de son équipage ni traces de lutte. En 1976 à Yamijima, une île fictive isolée au Sud du Japon, une équipe découvre dans la nuit du 3 août 1976 l'unique survivant des habitants de l'île répétant en boucle : « La sirène sonne, n'allez pas dehors. »... 

26 ans plus tard, Yuki Amamoto s'installe sur l'île avec son père et son petit frère souffrant, dont elle s'occupe comme de son enfant depuis la mort de leur mère. À l'exception du médecin local, l'accueil réservé par la petite communauté insulaire est glacial. Yuki se voit conseiller de ne pas sortir dehors lorsque la sirène retentit et découvre un carnet relatif aux événements de 1976. Elle vit alors une série de faits troublants... En dire plus serait dévoiler l'intrigue si admirablement ficelée. 


The Island

Le premier point fort du film c'est son ambiance. Une petite île insulaire battue par les flots sert de cadre à ce huis clos claustrophobe où la réalité, le fantasme se mélangent sans cesse. Le réalisateur reprend quelques aspects du jeu, le contexte, la communauté et surtout les multiples références à la mythologie japonaise, à lovecraft et au cinéma d'horreur. Les séquences dans la forêt, le huis clos dans la maison sont excellentes. Les plans autour de la sirène distille une terreur accentuée par la musique stridente. 

Le deuxième point fort c'est le montage. Le réalisateur maintient la tension jusqu'à un final étonnant et surprenant. La puissance de la révélation n'est jamais écornée malgré les "petits cailloux" disposés tout au long du film. On est d'autant plus surpris qu'en revoyant le film on retrouve tous ces éléments qui auraient dû nous mettre la puce à l'oreille. Mais l'ambiance est si prenante qu'à aucun moment nous sommes en état de reprendre le contrôle. Pendant 1h 20 nous plongeons avec la jeune Yuki dans la peur, dans les délires paranoïaques. 


Un modèle d'adaptation

Le troisième point fort c'est d'avoir pris de la distance avec le jeu d'origine (auquel je n'ai pas joué alors je me fie aux commentaires de gamers). Le travail  de Yukihiko Tsutsumi rappelle celui de Christophe Gans pour Silent Hill. Une réécriture de l'univers pour plaire à la fois au public du 7è Art et aux contraintes du média. Le résultat c'est que le film est compréhensible, adaptée à tout le monde. Inutile d'avoir déjà joué au jeu. En plus le réalisateur joue à fond sur la connaissance du jeu pour nous mener sur des fausses pistes. 

Alors peut être que les fans du jeu seront déçus de ne pas retrouver son adaptation stricto sensu mais le plaisir du cinéphile est sans commune mesure. Le quatrième point fort ce sont les acteurs. Tous très bons, Yui Ichikawa en tête qui réussit à tenir sur des frêles épaules tout le poids de l'intrigue. Les seconds rôles, père, photographe, marins, voisins sont tous au diapason. Clin d'oeil sympa, ce petit film a pu disposer de  l'énorme Hiroshi Abe pour un tout petit rôle, celui du survivant de 1976. Petit bémol dans ce bilan, quelques effets visuels (au sommet de la sirène) perfectibles et le trailer...


Ne boudons pas notre plaisir, Forbidden siren est une réussite par son ambiance et son histoire. Très intelligent, il exploite l'ambiance du jeu vidéo d'origine pour offrir une grade expérience cinématographique.



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