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1543 : un naufrage à Tanegashima provoque une révolution militaire

1543, un navire portugais est jeté par une violente tempête contre les côtes du Sud Kyushu. Débarquant à Tanegashima son capitaine rencontre le seigneur du lieu Shimazu Tokikate auquel il vend une poignée d'engin aussi meurtrier que moderne pour l'époque : des arquebuses à mèche dernier cri. De cet accident va naître une révolution militaire dans le Japon belliqueux des guerres de clan qui à la différence de celle advenue en Europe ne débouchera pas sur une révolution politique et sociale.

Il serait faux de penser que le japon ne connaît pas l'arquebuse. Des modèles grossiers circulant en Chine et en Corée ont circulé. Mais la version portugaise est plus légère, plus précise. Et pour des samouraïs dont l'arme de prédilection est l'arc avant le sabre, l'attrait pour les armes de jet est fort. D'autant que la maîtrise de l'arquebuse ne demande qu'une semaine contre deux à cinq ans pour l'arc ! En à peine deux ans, les forgerons japonais copient et améliorent l'arme en la dotant d'un cache qui protège le bassinet rempli de poudre et permet de tirer même sous la pluie.  Elle est aussi allégée (7 à 8 kg), ne suppose plus l'usage d'une fourche. Les balles sont standardisées. L'arme est produite en masse quasi industriellement. Les seigneurs de guerre voient vite l'intérêt militaire. Ils peuvent équiper des masses de fantassins les ashigaru disponibles en grand nombre grâce au progrès agricole.  Pragmatiques, les fantassins modernisent l'emploi tactique. Confrontés à leur vulnérabilité en rase campagne face à la cavalerie et à la lenteur du rechargement, les seigneurs de guerre les emploient leurs arquebusiers au centre protégés sur les ailes par la cavalerie (comme en Europe) et surtout inventent 20 ans les Européens la tactique du feu roulant, les fantassins en ligne tirent à tour de rôle assurant un feu continu. L'effet est dévastateur. En 1575, le feu roulant des fantassins d'Oda Nobunaga décime l'excellente cavalerie des Takeda. L'art de la guerre change. L'arc disparaît ou presque du champs de bataille, l'armure du samouraï est renforcée d'une plaque de métal pour résister aux armes à feu, l'articulation entre les différentes armes est améliorée. Les samouraïs eux mêmes descendent de cheval pour combattre à pieds et encadre ces fantassins. Ce sont ces dizaine de milliers de fantassins (170 000 hommes lors de la bataille de Sekigahara de 1600 à comparer aux 30-40 000 hommes des armées espagnoles ou françaises à la même période) qui emportent la décisions.

Mais le temps de la révolution sociale n'est pas encore venue. La peur des masses hante les samouraïs. Une fois la paix assurée, les Tokugawa redonnent le pouvoir aux élites aristocratiques. Le port des armes est réservé aux samouraïs. Les ashigaru ne connaissent pas d'ascension sociale. Le pays (édit du Sakoku) se ferme aux influences étrangères.

A noter que 6 ans plus tard les portugais introduiront au Japon une autre "arme", le catholicisme par le biais du jésuite espagnol François-Xavier installé dans le comptoir portugais de Goa.

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