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l'histoire par la photographie : l'incident de TianAmen, 5 avril 1976

Les funérailles de dirigeants politiques sont dans la Chine contemporain des moments propices à l'expression de la contestation. La mort de Hua Yaobang, réformateur communiste le 15 avril 1989 a donné lieu à des manifestations spontanées de deuil sur la place Tian'Amen qui ont été le point de départ du mouvement contestataire qui a embrasé Pékin en 1989.



13 ans auparavant un autre décès entraîne une contestation aussi courageuse qu'imprévue annonçant la fin du maoïsme Ces deux  clichés ci-dessous ont été pris le 9 janvier 1976 le lendemain du décès de Zhou Enlai, le premier ministre de Mao, le numéro 2, du régime  l'homme du rapprochement avec les Etats Unis et représentant du courant modéré et éclairé au sein du Parti Communiste Chinois. Conscient des risques de manifestations ostensibles de deuil et de critique du régime, Mao interdit les rassemblements. Lui-même ne se rendit pas aux obsèques de son serviteur. Décision logique de son point de vue, elle fut prise par la population comme une marque d'irrespect. A la surprise de la population chinoise, Zhou Enlai demanda à ce que ses cendres soient déposées non pas au cimetière de la Colline aux Huit Trésors aux reposent les autres figurent du PCC mais au-dessus des collines et des rivières de sa région natale. Cette décisions servit de catalyseur au mécontentement du peuple chinois qui voyait disparaître la seule figure capable de stabiliser le pays après le gouffre d'horreur de la Révolution Culturelle et de protéger la population des turpitudes de la Bande des Quatre. Spontanément des millions de Chinois se massèrent dans les rues pour exprimer leur peine (photo de gauche) arborant des pancartes portent des slogans "Vous nous manquez premier ministre Zhou" (photographie de droite).


Les interdictions décrétées le 15 janvier par la Bande des quatre connues comme les Cinq nons  - non au port de brassard noir, non aux couronnes mortuaires, non aux salles de deuil, non aux activités de mémoire et non à l'affichage de photos de Zhou - ne parviennent qu'à attiser le ressentiment de la population. Il suffit d'un incident pour que la population ose braver l'interdit. Des détonations de feux d'artifice sont entendues près du complexe du Lac central du Sud, Zhongnanhai où résident les membres du gouvernement. Une rumeur se propage dès le lendemain : le président Mao aurait lui-même lancé ces feux qui dans la tradition chinoise sont un expression de joie. En se livrant à une telle démonstration alors Zhou Enlai était juste mort, Mao aurait violé les règles de la bienséance et manifesté son mépris pour le défunt. Or le 5 avril les Chinois se livrent au saomu l'entretien des tombes des ancêtres. Une foule (2 millions de personnes) se rassemble le 4 avril sur la place Tien'Amen et rend hommage à Zhou défiant ainsi le pouvoir de la Bande des Quatre tout en critiquant directement leur pouvoir ainsi que celui de Mao. Des poèmes et dazibaos (affiches) sont placardées proclamant "l'ère du Qin Shihuang [empereur] moderne est terminée". Jian Qiang, la veuve de Mao, est aussi comparée à Wu Zetian, une ambitieuse concubine qui entre 690 et 704 profita de la mort de l'empereur Tang Gaozong pour se faire proclamer impératrice et instaurer une nouvelle dynastie les Zhou avant d'être renversée par une rébellion des Tang. Les forces de sécurité interviennent pour disperser la foule et évacuer la place dans la nuit. De violentes émeutes se déclenchent, plusieurs bâtiments gouvernementaux sont saccagés avant que l'ordre ne soit rétabli à 22 heures. Plusieurs certaines de personnes sont arrêtées (4000 au maximum) et condamnées à des peines de prisons dans les camps de travail, certaines auraient été mêle sommairement exécutées. 



Mais malgré la répression le peuple chinois a choisi. En octobre 1976, la bande des Quatre est renversée et condamnées. Deng Xiaoping, le nouvel homme fort, partisan de l'ouverture économique et de la fin du maoïsme libère dans la foulée les condamnés du 5 avril.


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