Actualité oblige un tour d'horizon des vertiges architecturaux de nos dictateurs d'hier et d'aujourd'hui s'impose. La tradition du pouvoir d'imprimer sa présence dans le paysage est aussi vieille que l'Humanité : pyramide, palais du roi Minos, Versailles.
Ces constructions certes mégalomaniaques ont offert des trésors patrimoniaux indépassables tout en stimulant la créativité artistique. Des palais des rois normands de Sicile, syncrétisme des influences byzantines et arabes, en passant à l'Alhambra, la cité interdite ou Versailles la perle de l'art classique, il est difficile de ne pas reconnaître la virtuosité esthétique de ces créations entrée au patrimoine de l'humanité. Mais avec la naissance ou la renaissance de la démocratie à la fin du XIXè début XXè siècle, le pouvoir est devenu plus sobre. Il réoccupe les anciens palais du pouvoir, sa légitimité naturelle ne lui impose pas de réoccuper l'espace de manière excessive. Si ces pouvoirs démocratiques marquent toujours l'espace, c'est en élevant des musées (Centre Pompidou, Pyramide du Louvre, Musée du Quai Branly) ou en enrichissant les structures culturelles. Les monuments à la gloire personnel s'efface au profit de construction dédié à la collectivité. Il n'en est pas de même pour les dictatures et autre pouvoir fort installé après 1945. Le maître mot est la démesure, la copie des chef d'oeuvre anciens. Autant les palais des rois sont devenus des icônes intemporelles des Beaux Arts, autant les palais des dictateurs sont des balises du kitsch et du Mauvais Goût. Visite guidée à travers ces immenses symboles de l'hubris de l'Homme.
Europe
Priorité au petit dernier : le palais de l'ex dictatuer ukrainine Ianoukovitch. Quand Disney encontre Las Vegas. Le palais le plus kitsch du moment où l'on trouve pêle-mêle un bâteau pirate, un temple grec, un lac style Versailles. Le pire de la culture big mac mondialisée.
Restons en Europe de l'Est avec l'ancien palais de Ceaucescu. En son temps il était le deuxième plus grand bâtiment du monde après le Pentagone, pas mal pour un pays qui connaissait des coupures du courant régulières au point qu'il était conseillé de ne pas chauffer les appartements au de-là de 14 degrés. Grandiose illustration du vertige des ex dictateurs staliniens
Asie Centrale.
Que donne la rencontre entre des ex républiques soviétiques post staliniennes et un coffre fort en hydrocarbures : le paradis pour les architectes mondiaux (Norman Foster) et les entreprises de BTP (Bouygues en tête). La clique des présidents élus à vie des "républiquestan" fait dans l'original : construire des villes pharaoniques à la croisée entre le Germania d'Hitler et l'univers de 1984. Grand, clinquant, très kitsch...
Astana capitale du Kazakhstan
Achgabat capitale du Turkménistan
Tachkent capitale de l'Ouzbékistan
Moyen Orient
Dictature, désert et imaginaire des mille et nuit. De la Libye au pays du Golfe en passant par l'Egypte, le pire côtoie le meilleur avec un fil directeur : le rococo, la surcharge en dorure, marbre et cristal.
Pour le meilleur ou presque :
Abu Dhabi: mille et nuit et berlines... Pourquoi faire dans l'original ?
Irak : Saddam Hussein entre tradition bédouine et palais ottoman.
Libye : palais de Khadafi, l'eau l'or du désert.
Egypte, palais de Moubarak, classe et équilibre
Pour le pire : le Palais de Ben Ali (Tunisie)... sans commentaires
Afrique sub Saharienne : passé colonial et volonté de promouvoir la culture locale offre des créations étonnantes tel le Versailles dans la Jungle (ci-dessous), petit nom donné à l'ex dictateur du Zaïre Mobutu.
Zimbabwe palais de l'ancien dicateur Robert Mugabe. Un petit air de manoir anglo saxon style louisiane et de villa pour milliardaire. Beverly Hills en Afrique.
Asie : les plus mystérieuses
Passons sur la Corée du Nord, les derniers staliniens du monde qui ont conservé le style lourd, froid et rigide des palais soviétiques (ci-dessous le mausolée de Kim Il Sung).
Plus intéressante est la nouvelle cité interdite de Pékin, Zhongnanhai (Mer Centrale et du Sud) situé à l'Ouest de la Cité Interdite historique et occupant une superficie comparable.
Terminons par un cocorico national. Le moulin de Cossy de Monsieur Balkany. 1.000 m² sur quatre étages au milieu d’un parc de 4 hectares avec piscine, hammam, court de tennis, salle de gymnastique..
« C’était très grand, se souvient le créateur du festival musical de
Giverny. J’y suis retourné une fois, je voulais voir ce que c’était
devenu. Patrick Balkany m’a reçu très gentiment. Ça a effectivement
beaucoup changé. Beaucoup de travaux, beaucoup de décoration. Pas
toujours de très bon goût. Très clinquant, très “parvenu ”, un peu à
l’image du bonhomme. »
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