Etrange accident d’avion : la mort de Lin Biao

Le 13 septembre 1971 en Mongolie l’épave de  l’avion transportant Lin Biao - n° 2 de la République Populaire de Chine- sa famille et des amis est retrouvée. Aucun n’a survécu au crash. Retour sur cette étrange affaire

 Lin Biao fut un personnage central de la Chine maoïste. Fil d’un petit propriétaire terrier, il entre à 18 ans dans l’académie militaire de Whampoa fondé par Sun Yat Tsen le père de la nation. Il y fait une rencontre déterminante : celle de Zhou Enlai, un des fondateurs du PCC qui sera le n° 2 non officiel du régime pendant toute l’époque maoïste.  Colonel à 20 ans il choisit le camp et c’est vers 1927 qu’il rencontre Mao. 5 ans plus tard il prend la tête du 1 er corps de l’APL, la future armée chinoise. Il participe à nombre de combats contre les nationalistes, fait partie des survivants de la Longue Marche, combat les Japonais. Il forme surtout à Yan’an les cadres de la future armée et entame la conquête de la paysannerie, instrument de leur victoire lors de la guerre civile.  Ses actions se révèlent décisives au point d’être dès 1955 nommé maréchal.

Son passage à la vie politique se fait plus lentement. Ministre de la défense en 1959, il fait montre d’une grande fidélité à Mao, soutenant la « rupture » idéologique avec l’URSS en définissant deux voies à la victoire communistes. La voie russe s’applique aux pays développés, la voie chinoise s’adapte aux pays colonisés. L’année 1959 marque ainsi le tournant de sa carrière. En plein débat critique sur le grand bond en avant mené par Peng DeHuai  (héros de la guerre de corée et ministre de la défense) un ancien militaire comme lui, Lin Biao choisit le camp de Mao et mène une violente critique du ministre accusé de trahisons. Son action lui vaut de récupérer la place de Peng DeHuai.

Au cours de la révolution culturelle, il reste dans l’ombre de Mao considérant que l’APL sera appelée en ultime recours. Ainsi après avoir laissé les gardes rouges agir, il reprend la main en 1968 lorsque Mao décide de rétablir l’ordre. L’armée élimine les bandes de gardes rouges rebelles et envoie les plus dociles à la campagne pour rééducation. Il devient dès lors le n° 2 du parti.

Ce qu’il ignore c’est que cette place est dangereuse. Liu Shaoqi son prédécesseur a été purgé en 1968. Zhou Enlai n’en veut pas. En effet la lutte au sommet est terrible et Mao utilise les trois factions en présence (Liu, Zhou Enlai et la bande des quatre) pour affermir son pouvoir. Depuis  les années 1960 Mao vit dans la terreur de voir surgir un khrouchtchev chinois qui entamerait une démaoisation. L’échec du grand bond en avant avait écarté provisoirement le grand timonier qui a profité de la révolution culturelle pour reprendre les rênes. Dès 1970 les tensions au sommet du pouvoir se focalisent sur deux sujets

• La mise en place de comités provinciaux qui reprendraient le pouvoir confié à l’armée lors de la remise au pas des gardes rouges. Lin Biao n’en veut pas

• Le rapprochement historique avec les USA. Lin est pro-URSS.

Lin qui a été utile dans l’élimination de Liu Shaoqi et des gardes rouges devient un obstacle. Mao entreprend d’écarter ses proches des postes à responsabilité.  La suite est plus trouble.

D’après la version officielle Lin Biao aurait tenté un coup d’état avec la complicité de Taïwan et aurait même prévu d’assassiner Mao les 8 et 9 septembre 1971. Mais sa fille aurait dénoncé le complot. Lin et sa famille aurait embarqué en catastrophe dans un avion à destination de l’URSS qui se serait écrasé par manque de carburant. La version des enquêteurs est beaucoup plus simple. Lin Biao n’avait aucun projet de coup d’état. Mais il a été mis au courant des projets de Mao concernant sa purge. Il a pris les devants en essayant de fuit avec sa famille sauf sa fille qui opposée prévint les autorités. Il est  à noter qu’aucun avion chinois n’a tenté d’empêcher la fuite et que l’avion au moment du crash avait au moins 30 mn de carburant ce qui accrédite l’hypothèse d’une erreur de pilotage. L’avion volait trop bas afin d’éviter les radars et a heurté un relief. Les preuves de cette conspiration ourdie par Mao se trouvent dans les jours qui ont suivi l’accident. D’abord l’annonce de sa mort fut retardée de plusieurs mois tandis que dans les jours après l’accident la purge du clan de Lin Biao était lancée (effet de surprise garanti)  signe que le but était de faire chuter un clan, de le discréditer mais pas de tuer un vétéran. Ensuite les officiels chinois changèrent leur version de la mort de Lin signe qu’elle les mettait dans l’embarras. Enfin il faut attendre 1973-1974 pour voir la bande des quatre lancer officiellement l’accusation de complot. La figure de Lin Biao connaîtra une traversée du désert : accusé de trahison puis de collaboration avec la bande des quatre il faut attendre 2007 pour que son portait soit réhabilité.